Cette année, l’emblématique festival breton Au Pont Du Rock s’est tenu à Malestroit du 29 juillet au 1er août, dans des conditions très particulières du fait des restrictions sanitaires imposées par le gouvernement.
Au Pont Du Rock, exceptionnellement réorganisé sur fond de Covid-19 sous l’égide d’une jauge quotidienne inférieure à 5 000 festivaliers, à raison de trois concerts par soir, a réuni en réalité 6 500 personnes réparties sur les 4 jours, alors qu’une fréquentation sur l’ensemble du festival comprise entre 10 et 12 000 entrées était espérée. Ce bilan en demi-teintes, conséquence de la mise en place du pass sanitaire, se traduit par un déficit budgétaire dont les organisateurs se seraient sans doute bien passé, même si l’ambiance et les sourires ont toujours répondu présents. Ainsi, tous, des techniciens aux spectateurs, en passant par les bénévoles, étaient visiblement heureux d’être là, et le meilleur accueil nous a été accordé.
Jeudi 29 juillet
La soirée commence en douceur par le concert d’Yseult devant lequel se regroupent les 300 premiers festivaliers. Je ne m’étendrais cependant pas sur ce dernier, les photographes n’étant pas les bienvenus dans le pit. Je me suis donc contenté de réaliser quelques images dans le public, avant de me rendre à l’espace VIP pour y retrouver quelques collègues. Nous y avons alors débattu amicalement sur les restrictions de prise de vue de plus en plus présentes, le plus souvent émanant de personnalités émergeantes qui, sous le couvert de caprices de diva, nous pourrissent la vie.
Ma première entrée dans le pit se fait donc à l’occasion du concert d’Asaf Avidan qui, malgré divers déboires techniques successifs, suscita l’engouement des festivaliers désormais nettement plus nombreux devant la scène. L’artiste israélien, déjà auteur de sept albums, affiche un fort « capital sympathie ». Il avait en effet de nombreux fans dans le public. L’un d’eux témoigne : «Je l’ai vu une vingtaine de fois sur scène. Le dernier concert c’était en 2020 à Tel Aviv ». Un autre ajoute : «Ce matin, j’ai croisé Asaf Avidan qui promenait ses chiens dans Malestroit en compagnie de sa famille. Nous avons échangé quelques mots en anglais. Il m’a même dédicacé le seul papier que j’avais sur moi, à savoir mon test PCR ».
Last Train, groupe alsacien de rock alternatif vient clore cette première soirée via une prestation dynamique. Fort d’une belle expérience de la scène, le quatuor conquiert rapidement le coeur du public. Côté lumière en revanche, c’est loin d’être la panacée, la plupart des sources d’éclairage étant placées en contre-jour.
Vendredi 30 juillet
Plus nombreux que la veille, les festivaliers se pressent vers la scène pour y voir Joy.D, chanteuse et musicienne originaire de la région vannetaise, dont la pop soul rythmée, aux consonnances réunionnaises, semble séduire une bonne partie des festivaliers, bien qu’elle ne me touche guère. Elle cède ensuite la place à Alain Souchon, tête d’affiche de la soirée qui, durant quasiment une heure trente, va chanter ses plus grands succès en les ponctuant d’anecdotes et d’échanges avec les quelques 2 000 personnes présentes. Le chanteur de 77 ans est en phase avec son public, un soutien-gorge atterrissant même « miraculeusement » sur la scène, sous le regard amusé de l’artiste. La soirée se termine avec la prestation d’Hervé, que je m’abstiens de commenter, les photographes indépendants étant refusés dans le pit, je n’ai donc vu aucune raison de m’attarder devant la scène.
Samedi 31 juillet
Cette troisième soirée du festival, orientée metal et punk rock, est la plus fréquentée des quatre : 2 500 festivaliers ont ainsi répondu présents dans une ambiance très familiale. Certains d’entre eux sont venus d’Amiens alors que d’autres ont fait le voyage depuis Valenciennes : Ultra Vomit déplace les foules ! Le groupe de metal parodique ouvre le bal en nous gratifiant de son désormais habituel show satirique et cartoonesque. Les fans massivement agglutinés devant les « crash » barrières sont en liesse. La soirée commence bien !
No One Is Innocent prend ensuite le relais devant un public désormais chauffé à blanc. Le bondissant chanteur Kemar et sa bande de joyeux drilles, accompagnés pour l’occasion d’une poignée de musiciens berbères présents sur quelques titres, nous offre un concert de très belle facture. La journée déjà bien remplie se termine sur le passage de Tagada Jones, en compagnie de trois violons et d’une contrebasse, sur fond de quelques effets pyrotechniques. Rappelons au passage que le groupe vient de fêter sa vingt-septième année d’existence.
Dimanche 1er août
Les paysans gascons de The Inspector Cluzo amorcent la dernière soirée du festival, assistés de quelques musiciens classiques (clavier, violoncelle et violon) dans le cadre d’une session acoustique. Or, même si j’apprécie le groupe, j’éprouve une certaine lassitude devant ce type de concert, dans lequel je vois plus un effet de mode qu’une réelle recherche musicale (ce « phénomène » des albums déclinées en version acoustique dure depuis un peu trop d’années à mon goût). Le milieu de soirée est assuré par Feu! Chatterton, quintette parisien qui offre une prestation enjouée et colorée sous la houlette de son chanteur Arthur Teboul. Pour l’occasion, le groupe fait même monter sur scène son producteur Arnaud Rebotini, ce dernier donnant ensuite le concert de clôture du festival, face à un public encore bien présent.
Au final, il est probable que le festival, fort de sa réputation et riche d’une programmation très éclectique, aurait fait le plein de festivaliers sans les contraintes sanitaires induites par le Covid-19, « nouvelle » épée de Damoclès des temps modernes. Souhaitons au futur millésime 2022 de voir le jour sous de meilleurs auspices.
Pascal Druel
propos recueillis par Maryse Glon
Diplômé de l’Ecole Nationale Supérieure Louis Lumière, amoureux d’images et photographe au quotidien, j’explore depuis plus de 30 ans la photographie sous diverses formes (prise de vue, développement et tirage argentique, contrôle qualité, repique, traitement et retouche numérique, graphiste, prise de vue, formateur, photographe indépendant). En outre, je collabore occasionnellement avec Chasseur d’Images (magazine pour lequel j’ai été rédacteur pendant une douzaine d’années), signe des ouvrages (publiés aux Editions Eyrolles), réalise de multiples prestations photographiques (books, reportages, mariages) et couvre en images de nombreux festivals et concerts (150 à 200 scènes par an).